Cette semaine, nous avons une tranche de vie d'Alexis Viger qui nous raconte une de ses expériences de DBL Ball.
Mon équipe mène par un but.
La marque est de cinq à quatre. Combien de temps reste-t-il à la partie n'a pas d'importance. La partie pourrait prendre fin d'ici quinze secondes, comme elle
pourrait toujours être disputée dans quinze minutes. Au DBL Ball, chaque partie
connaît la même issue : la première équipe à marquer six buts l'emporte.
Nous
avons bien joué jusqu'à présent, cette partie comme durant toute la
saison. Nos chances sont bonnes de remporter le championnat. En fait, nous n'avons jamais été aussi prêts. Nous avons marqué presque qu'une centaine de but cette saison, mais ce soir, il n'y a qu'un but qui compte. C'est le sixième but. Celui-ci nous permettra de soulever la Coupe du DBL Ball au
bout de nos bras.
L'arbitre siffle, les dix
joueurs se mettent en mouvement. Le ballon est gagné par l'équipe adverse.
Derrière moi, mon adversaire se faufile à toute vitesse. Mes réflexes bien
aiguisés ne s'avèrent pas suffisants. En l'espace de quelques secondes il se
dégage de ma couverture. Cette erreur peut nous coûter cher.
Aussitôt que cette idée traverse mon esprit, le ballon est projeté d'un
bout à l'autre du terrain, surplombant mes coéquipiers, impuissants devant
cette passe parfaite. À l'endroit où j'aurais dû me trouver, le joueur adverse
saisit le ballon et ne rate pas une telle chance de niveler la marque.
5 à 5 prochain but, gagne.
C'est dans de tels moments que l'on se rend compte qu'au DBL Ball,
chaque seconde compte.
Soudain, je me remets
en question. Suis-je trop épuisé pour être sur le terrain? Du coin de l'œil, je
regarde mon coéquipier sur le banc. Aurait-il pu empêcher l'équipe adverse de
créer l'égalité si je lui avais laissé ma place? Je croyais avoir bien géré mon
énergie jusqu'à maintenant, mais la dernière séquence me laisse perplexe. Il
semble que mon adversaire prétende à la victoire avec la même avarice qui
m'habite présentement. Et en le voyant, de l'autre côté de la ligne centrale,
le regard posé au sol, le corps soulevé par chacune de ses respirations
haletantes, je me ressaisis. Cette victoire, je la veux plus que quiconque.
L'arbitre siffle à nouveau.
Mon équipe s'installe
en offensive. Nous sommes passés maîtres dans l'art de manipuler le ballon, de
feinter l'adversaire et de lancer au moment où personne ne s'y attend. Mais
devant nous, les deux gardiens se dressent telle une muraille et aucun tir ne
semble vouloir trouver le fond du filet. Jusqu'à ce que je distingue une faille
dans le mur. Un tout petit espace, entre l'épaule d'un gardien et le coin du
filet, juste assez grand pour permettre au ballon de s'y loger.
Derrière le
but, mon coéquipier dribble, attendant le moment opportun pour s'exécuter. Nos
regards se croisent et, comme s'il lisait dans mes pensées, il me décoche une
passe vive. Le temps semble s'arrêter, j'ai la victoire au bout des doigts! Mes
muscles se contractent, mon bras s'élance, le ballon part tel un missile en
quête de sa cible. Les spectateurs sont déjà debout! Tout le monde retient son
souffle.
Tout le monde, sauf moi. Dès l'instant où le ballon a quitté ma main,
j'ai vu que mon tir manquait de précision. Je sais qu'il ne traversera pas
le filet, mais il est déjà trop tard. Une erreur d'exécution sur un geste que
j'ai pratiqué tellement souvent. Pourquoi faut-il que j'échoue ce moment si
important?
La déception sur mon
visage se transforme en peur.
Cette peur est alimentée par le joueur adverse qui se saisit du retour et se
met à courir vers notre but. Il dribble et court, plus vite que n'importe qui sur le terrain.
Plus vite que mes coéquipiers qui courent à ses trousses. Plus vite que
l'arbitre qui est au bord de l'épuisement. Et plus vite qu'il ne me faut pour lever les yeux au ciel, juste
après l'avoir vu plonger et déposer le ballon de l'autre côté du but.
Ce revirement de situation rend la défaite encore plus difficile à
avaler. Alors que l'autre équipe, sacrée championne, célèbre ensemble, moi,
seul à l'autre bout du terrain, je suis rongé par la déception, les remords et
la culpabilité. J'ai manqué ma chance et nous avons perdu. Seul, je ne peux me
sortir cette pensée de la tête. Heureusement pour moi, mes
coéquipiersi me font retrouver la raison.
Ils me rappellent
pourquoi je pratique ce sport, non pour la victoire, mais pour le plaisir de
jouer. Je suis entouré de joueurs talentueux, filles et garçons, étudiants et
parents, qui sont aussi bons sur le terrain qu'à l'extérieur. Mes adversaires,
bien que je les envie d'avoir remporté le championnat, sont ceux qui me
permettent à chaque partie de me dépasser et de donner le meilleur de moi-même.
La saison est terminée, mais je pense déjà à la prochaine. Remplie de
nouveaux défis, de rebondissements et de gens qui partagent la même passion que
moi : le plaisir de jouer.
Alexis Viger
Alexis Viger (premier à gauche) remportant sa 2e Coupe du DBL Ball en Juin 2008. Il est l'un des joueurs les plus expérimenté. |
Très bel article Alexis!
RépondreSupprimerEn effet, c'est sentimental sur le jeu, mais il faut garder avant tout le plaisir de jouer!